Blog d'actualités juridiques par Maître Thierry Vallat, avocat au Barreau de Paris (33 01 56 67 09 59) cabinet secondaire à Tallinn ISSN 2496-0837
Le soupçon de fraude fiscale est soumis, depuis le 20 juillet dernier, à l'obligation de déclaration conformément à l'article L
561-15 du Code Monétaire et Financier, mais uniquement lorsqu'il y a présence d'au moins un des critères définis par le décrat n°2009-874 du 16 juillet 2009.
Rappelons que les avocats, bien que soumis à cette règlementation, ne le sont que sous certaines conditions et limité le champ d'intervention de la 3ème directive qui ne s'applique ni à leurs
activités judiciaires, ni à leurs activités de conseil
Le décret, paru au Journal officiel du 18 juillet, précise les 16 situations à risque. Entre autres, des opérations ou flux incohérents par rapport à l'activité habituelle, ou la difficulté
d'identifier les bénéficiaires des fonds.
Pour rappel, la fraude fiscale est traitée de manière spécifique par l'ordonnance du 30 janvier 2009. Le texte impose notamment aux avocats et aux experts-comptables de déclarer "les sommes ou opérations dont ils savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles proviennent d'une fraude fiscale lorsqu'il y a présence d'au moins un critère défini par décret". (article L. 561-15-II du code monétaire et financier)
Certains montages juridiques et financiers doivent attirer l'attention. Tel est le cas de "l'utilisation de sociétés écran, dont l'activité n'est pas cohérente avec l'objet social ou
ayant leur siège social dans un Etat ou un territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention fiscale permettant l'accès aux informations bancaires".
Autres situations : "la réalisation d'opérations financières par des sociétés dans lesquelles sont intervenus des changements statutaires fréquents non justifiés par la situation économique de
l'entreprise" et "le recours à l'interposition de personnes physiques n'intervenant qu'en apparence pour le compte de sociétés ou de particuliers impliqués dans des opérations financières".
La fraude à la TVA de type carroussel est également visée par le décret. .
"La réalisation d'opérations financières incohérentes au regard des activités habituelles de l'entreprise" doit également éveiller les doutes du professionnel du chiffre. De même, "la progression forte et inexpliquée, sur une courte période, des sommes créditées sur les comptes nouvellement ouverts ou jusque-là peu actifs ou inactifs".
Ou encore, "la constatation d'anomalies dans les factures ou les bons de commande lorsqu'ils sont présentés comme justification des opérations financières", par exemple l'absence du numéro
d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou du numéro de TVA.
Doivent également alerter "le recours inexpliqué à des comptes utilisés comme des comptes de passage ou par lesquels transitent de multiples opérations tant au débit qu'au crédit, alors que les
soldes des comptes sont souvent proches de zéro" ou encore "le retrait fréquent d'espèces d'un compte professionnel ou leur dépôt sur un tel compte non justifié par le niveau ou la nature de
l'activité économique".
Face à des situations peu transparentes, la vigilance est de mise, la fraude fiscale n'étant peut-être pas loin.
Notamment lorsqu'un avocat rencontre des difficultés pour "identifier les bénéficiaires effectifs et les liens entre l'origine et la destination des fonds" en raison par
exemple "du recours à des structures sociétaires complexes et à des montages juridiques et financiers rendant peu transparents les mécanismes de gestion et d'administration".
Autres situations potentiellement dangereuses : "les opérations financières internationales sans cause juridique ou économique apparente se limitant le plus souvent à de simples transits de fonds" ou "le transfert de fonds vers un pays étranger suivi de leur rapatriement sous la forme de prêts".
Les doutes peuvent être également renforcés s'il se heurte à un refus de son client de "produire des pièces justificatives quant à la provenance des fonds reçus ou quant aux motifs avancés des paiements", ou même son impossibilité de produire ces pièces.